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Une figure emblématique de notre village

Pour cette rubrique consacrée à une personnalité marquante de notre commune, nous avons choisi pour ce premier portrait de rencontrer Mme Janine Chaleroux, dite Mamie Chaleroux.

En effet, c’est une figure emblématique à Quinçay, toujours très présente dans le domaine culturel et parmi les ainés de notre village. Elle a accepté de nous en dire plus sur elle, son vécu et sa bonne connaissance de l’histoire de notre commune : nous allons vivre une intéressante remontée dans le temps pour notre village…

La rédaction: Bonjour et encore merci de nous recevoir chez vous pour cet entretien. Par la suite, nous nous permettrons de vous appelez Mamie, si vous en êtes d’accord. Pourriez-vous svp vous présenter en quelques mots ?

Mamie : je suis née à Quinçay en 1927 et j’ai toujours habité ce village, pratiquement au même endroit : enfant à l’entrée du bourg et plus tard comme épouse aux Roches.

Mamie : je suis née à Quinçay en 1927 et j’ai toujours habité ce village, pratiquement au même endroit : enfant à l’entrée du bourg et plus tard comme épouse aux Roches.

Marié en 1946 à Quinçay (le Maire était Armand COUDREAU ndlr), j’ai élevé 4 enfants (3 garçons et une fille), qui m’ont donné 10 petits-enfants et 19 arrière-petits-enfants.

Mamie Chaleroux avec son futur mari Gérard en novembre 1945

 Actuellement, je pense être une des personnes les plus âgées ayant vécu en permanence à Quinçay.

 La rédaction: après cette intéressante entrée en matière, pouvons-nous maintenant évoquer votre parcours personnel, certainement très enrichissant pour nous tous ?

Mamie : ma mère est arrivée à Quincay en 1916 à l’âge de 13 ans, venant de Virolet, pour travailler à la ferme de Mr et Mme Augustin BRANLÉ et s’occuper du bétail. Elle habitait avec ce couple dans cette grande ferme à l’entrée du Bourg. Mes parents se sont mariés à Quinçay le 1er décembre 1925, c’est Monsieur BRANLÉ (Maire de Quinçay à l’époque) qui a réglé tous les frais de la cérémonie. Après leur mariage et pendant plus de vingt ans, ils ont partagé l’habitation du couple BRANLÉ où je suis née. Monsieur BRANLÉ, que j’appelais mon Grand Père, m’a beaucoup appris et aidé pour l’école, notamment pour retenir les tables de multiplication, qu’il me faisait réciter en fin de journée à la place de la prière

du soir. Son soutien scolaire, avant l’heure, m’a permis d’obtenir mon certificat d’études parmi les douze enfants de Quinçay et Masseuil le présentant cette année-là. Plus tard, j’ai emménagé avec mon mari dans une maison aux Roches, mitoyenne de mon habitation actuelle, construite par mon père et mon défunt mari Gérard. Celui-ci était arrivé à Quinçay dès l’âge de 14 ans pour garder les vaches chez Mr et Mme Eugène ALLEAUME, puis comme domestique agricole jusqu’en 1944.

La rédaction : comment se déroulait à cette époque une journée ordinaire à la ferme ?

Mamie : mon père se levait, pour donner la première brassée de foin aux animaux, puis allait tirer de l’eau au puits. Venait ensuite le petit déjeuner avec la soupe du matin et un café au lait. Les femmes partaient traire les vaches. Après, les unes restaient à la maison pour cuisiner, les autres menaient les vaches au pré du polygone militaire (appellation du champ de tir actuel), lorsqu’il n’y avait pas de tir d’artillerie ou allaient travailler dans les champs autour du bourg et dans les vignes. Tout le travail de la terre s’effectuait à la main pour désherber et biner le sol. Le soc pour tracer le sillon et labourer était tiré par un cheval, réquisitionné par les Allemands en 1941, qui sera remplacé par une paire de bœufs. A midi, tout le monde rentrait à la ferme, excepté ceux qui gardaient les troupeaux à l’extérieur du bourg et qui avaient pris le nécessaire pour manger sur place. Le travail continuait l’après-midi avec un retour des troupeaux à la ferme pour 16h00. Ensuite, c’était la préparation du dîner.  Après une courte veillée, chacun allait se coucher pour se reposer de la fatigue de la journée.

La rédaction : vous avez évoqué précédemment la conduite des troupeaux dans l’emprise du champ de tir. Pourriez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet, notamment  en nous racontant comment se passait alors la journée ? Mamie : avant de vous parler de la garde des troupeaux, je souhaiterais revenir sur l’impact de ce champ de tir sur l’activité agricole de la commune de Quinçay. En effet, sur ces terrains militaires, l’armée manœuvrait régulièrement depuis 1930, avec des tirs d’artillerie importants et assez violents. Des obus de gros calibre pouvaient tomber à moins de 1000 mètres de certains hameaux de

Quinçay. Les jours de tir, les cultivateurs ne devaient pas travailler dans les champs limitrophes et ils percevaient à cet effet, une indemnité pour « privation de jouissance ». Mais revenons au champ de tir et à nos troupeaux, car une partie de ce terrain militaire restant productive était louée à l’adjudication pour pacage et ramassage du foin. C’était très spectaculaire d’observer, les jours sans tir, le défilé des troupeaux de Quinçay, jusqu’à une dizaine, monter la côte des Roches à la queue leu leu… Les bêtes, environ une cinquantaine se mélangeaient en arrivant sur les lieux du pacage. Pendant que les bêtes se rassasiaient, bergers et bergères de tous âges s’occupaient de façon différente. Pour les enfants, c’était le jeu de cartes, ils jouaient même à la cartomancienne. Les femmes apprenaient le raccommodage, la broderie, le tricot aux petites filles. Quelques heures plus tard, au son de la voix de leur gardien(ne), les bêtes revenaient et se triaient toutes seules pour prendre le chemin du retour.
A l’automne, les châtaignes ramassées dans les bois voisins étaient grillées sur place ou rapportées à la maison. Les bergers cherchaient dans le polygone de tir des « boules de plomb » et des « liens d’obus » afin de les vendre à un ferrailleur contre quelques sous.
En juin, il y avait le ramassage de foin dans la plaine de Villeneuve, avec d’abord le fauchage au « dail » (faux), puis ensuite à la faucheuse tirée par un cheval. Après la fenaison, le foin était mis en « mulon » (tas), puis rentré dans les fenils.
Que de bons souvenirs à se rappeler! Au gré des rencontres entre bergères et militaires, certaines aventures se sont terminées par des mariages.
Les années ont passé, les armes et le matériel militaire ont beaucoup changé, les terrains du champ de tir sont devenus très dangereux, entraînant une interdiction permanente d’y pénétrer, même pour aller ramasser des champignons ! C’est dommage, qu’il était beau ce chemin du Coudray à la Jagorderie qui traversait le champ de tir, en direction de Visais. Hélas, ce n’est plus qu’un lointain souvenir!

La rédaction : si l’activité économique est limitée actuellement dans le Bourg, elle devait être tout autre pendant votre jeunesse ?

 Mamie : avant la dernière guerre mondiale et jusqu’à la fin des années 60, la commune était riche en activités économiques, marquées par une forte présence de l’agriculture, environ 95 exploitations agricoles, très morcelées de 10 à 15 hectares pour chacune d’entre elles, mais avec néanmoins quelques grands domaines. Si l’élevage et les céréales étaient bien représentés, chacun avait sa petite vigne de 10 à 50 ares, suffisante pour sa consommation personnelle. Quelques surfaces plus importantes, de 1 à 4 hectares[1], permettaient d’en faire commerce ! A cette époque, la commune ne dépassait pas 750 habitants, d’après les différents recensements connus. Cette population étant très rurale, avec des moyens de déplacements limités, elle vivait en autarcie. Les emplois étaient locaux : 80% dans l’agriculture (fermiers, métayers, journaliers, ouvriers agricoles) et 20% dans l’artisanat (maçon, menuisier, charpentier, ébéniste, cordonnier, sabotier, meunier, boulanger, boucher, aubergiste, charron, maréchal-ferrant, etc.). Avec mon mari qui était cantonnier et les enfants, nous faisions un peu de culture, principalement du tabac.

La rédaction : merci pour cette plongée très intéressante dans le passé économique de notre commune. Certaines personnes de Quinçay, vous ont connue, enfants, lors de leur fréquentation de la cantine scolaire…

Mamie : au décès de mon mari, alors âgée de 41 ans je n’avais pas de métier reconnu, car j’avais toujours travaillé à la ferme avec mes parents, puis à élever nos enfants. Alors pour faire face à cette situation difficile,  j’ai fait des ménages et du repassage dans différents foyers du Bourg, par exemple à l’épicerie GIMMEL, à l’ancienne forge qui était devenu un café/hôtel/restaurant, puis à la pisciculture qui venait d’ouvrir. Lorsque la responsable de la cantine scolaire, Mme Peignault, prend sa retraite en 1970, je postule auprès de la commune pour la remplacer. Le conseil municipal et son maire, Monsieur Rivière, acceptent ma candidature et je suis embauchée comme cantinière scolaire à la rentrée de septembre 1970. J’ai travaillé à ce poste pendant 20 ans, 17 ans dans un bâtiment en face de la Mairie (à l’emplacement du salon de coiffure actuel), puis 3 ans au complexe scolaire avant de prendre ma retraite…


[1] L’association Quinçay Hier à Aujourd’hui indique dans une de ses publications consacrée à la vigne : « actuellement il ne reste plus qu’un hectare de vignes sur la commune, alors qu’au 19ème siècle, elle en comptait plus de 100 hectares ». Dans cette même publication, une carte dite des Cassini (relevé terminé en 1790) et un tableau d’assemblage du plan cadastral de 1830 localisent la vigne à Quinçay dans sa partie Nord Est, principalement aux Jaudouines (Grandes et Petites), aux Harcouettes et au fort de Sénéré.

La rédaction : d’où vient ce surnom de Mamie Chaleroux ?

Mamie : pendant les 20 années passées à la cantine, j’ai connu beaucoup de générations d’enfants, ils étaient une cinquantaine à mon embauche et plus du triple à la fin de ma carrière. A l’école, il y avait déjà une personne qui se prénommait Janine, étant déjà grand-mère, tout naturellement pour nous distinguer, les élèves et le personnel m’ont tous appelés Mamie Chaleroux, surnom qui m’est resté par la suite…

La rédaction: avant de conclure cet entretien, parlez-nous maintenant de votre très forte implication dans les associations et les activités culturelles de la commune ?Mamie : j’ai toujours participé aux activités associatives et culturelles présentes à Quinçay. Ma ligne de conduite a toujours été la suivante « s’occuper en faisant quelque chose d’utile, mais sans jamais vouloir s’imposer ». J’ai donné un coup de main pour tout, par exemple aux bourses aux vêtements et aux jouets, au club des aînés ruraux pour organiser des voyages et repas, à Quinçay d’Hier à Aujourd’hui pour des recherches sur le patrimoine aux Archives Départementales et à la rédaction d’articles pour les revues.

Enfin comme bénévole à la bibliothèque municipale et j’ai assisté aux premiers cours d’informatique, il y a 16 ans, organisés par Quinçay Loisirs. Cela me permet encore d’être à l’aise avec un clavier d’ordinateur, pour répondre à mes mails et aller sur Internet… Ah, j’allais oublier de vous en parler, mais j’ai également été responsable du travail en bénévolat à l’ADMR (Aide à domicile en milieu rural) de Vouillé pendant 30 ans. Mon seul bémol actuel est une restriction de mobilité, car j’ai décidé il y  a quelques années, l’âge venant, de ne plus conduire mon véhicule.

La rédaction : sur ses sages paroles, nous vous remercions de nous avoir accordé cet entretien pour évoquer cette mine d’informations sur la vie de la commune au fil des décennies.

Rédaction : François FAIVRE

Crédits photos : Claude ALLEAUME

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